Le cidre, comme un grand vin

Quand Jean-David Camus retrouve un vieux pressoir dans la maison de sa grand-mère il y a quelques années, il ne sait pas encore que celui-ci va changer le cours de sa vie. Ce consultant en marketing dans le milieu du vin, multi-entrepreneur, tente un nouveau coup : créer, à Beaune, dans la ville des grands crus, une cidrerie artisanale. Parce qu’en Bourgogne, il n’y a pas que la vigne qui pousse : « En cherchant, j’ai appris qu’Avallon, ça vient d’aval, qui veut dire pomme en celte. Il y a par ailleurs une variété de pommes, l’Avrolles, qui est originaire de l’Yonne. Et du côté de Santenay, on trouve pas mal de vieux vergers : j’avais envie de faire revivre tout ça » explique Jean-David. Le projet Eclectik est lancé en 2020, en association avec trois amis : « Mon environnement, ce sont des jolis vins. Je baigne dans cet univers. Dès lors, j’ai choisi de faire du cidre comme on fait des grands vins. »

Un élevage en futs de prestige
Tout va être étudié pour atteindre l’excellence. Dans le choix des pommes tout d’abord. Si Jean-David se fournit à Beaune, dans les environs de Dijon, ou encore dans le Jura, il tire l’essentiel de sa récolte des grands terroirs cidricoles français : la Normandie, la Bretagne, le pays d’Othe… Jusqu’ici, rien d’original. Ce qui fait la singularité d’Eclectik, c’est l’élevage. Les jus arrivent à Beaune entre octobre et novembre. Ils sont pris en charge par le « vigneron-cidricole » qui va les transvaser dans des fûts de vin ou de spiritueux prestigieux. Tous ont une histoire et ont contenu des grands crus issus de domaines viticoles réputés, des vieux Armagnac, des whiskies… « Mon travail va être de trouver le fût qui sublimera le mieux le jus de pomme en fonction de sa variété, de son terroir et du cidre que je veux obtenir au final » explique Jean-David. Les pommes du pays d’Othe iront facilement se loger dans un fût de vin blanc qui préservera leur côté minéral et floral. Les pommes du pays d’Auge vont peut-être préférer un fût d’Armagnac ou de fine de Bourgogne pour renforcer leur rondeur et leur moelleux de bouche.

« Un vrai accueil qualitatif sur le produit »
L’élevage dure 8 à 9 mois. Vient alors l’étape d’assemblage. Jean-David goûte ses 50 cuvées. Il mélange, il teste. Et compose : « Pour chaque cuvée, j’assemble entre 10 et 15 jus. Je vais chercher de la rondeur dans l’un, la vivacité dans l’autre, pour proposer une gamme de cidres marqués. » Les cidres sont mis en bouteille pour une prise de mousse selon la méthode champenoise. Sans sucre ajouté. Des extra-bruts qui commencent à séduire, à Beaune et ailleurs : les deux-tiers de sa production partent à l’export ; le reste est commercialisé par les meilleurs cavistes du secteur. On commence aussi à trouver les cuvées « Confluence » , « De cidre de là » et « Satori » sur les belles tables bourguignonnes. Alors qu’il s’apprête à soutirer son troisième millésime, Jean-David l’assure : « On a un vrai accueil qualitatif sur le produit. Mais la route est encore longue, on n’est qu’au début de l’aventure. »